Que se passerait-il si d’un coup vous changiez de vie ? Qu’en un instant vous incarniez la personne de l’autre côté du mur. Comment réagiriez vous ? C’est l’histoire de Self Made, réalisé par Shira Geffen.
Résumer Self Made est une tache complexe si ce n’est impossible tellement ce film est loin des canons habituels du cinéma israélien. Le film aborde pourtant au départ un sujet des plus classiques, à savoir la question du conflit entre Palestiniens et Israéliens.
En réalité, la trame de cette oeuvre n’est pas ce conflit en lui même, il n’est que prétexte pour parler du sens de la vie malgré le pitch traditionnel du long-métrage. Self Made raconte l’histoire de deux femmes, l’une Israélienne et l’autre Palestinienne, confinées dans leur mondes respectifs. Suite à une confusion, elles se retrouvent à vivre la vie de l’autre.
Cette situation plutôt classique va rapidement exploser et partir dans une confusion généralisée, il n’est ici pas question de perte d’identité ou de terre mais de l’absurde pur et dur. Des situations ubuesques s’enchaînent une à une, le téléspectateur est entraîne dans des flots de quiproquos comiques.
Samira Saraya, qui interprète brillamment l’ouvrière palestinienne, est habitée de doutes. Elle passe ses journées à remplir des sacs de vis pour une marque de meubles en kit. Antithèse de l’héroïne palestinienne qui voudrait défendre un idéal national, elle semble déconnectée de la réalité et ne plus avoir de but dans la vie.
L’artiste israélienne, jouée par Sarah Adler, est quant à elle une artiste adulée pour son travail plastique. Torturée par ses réflexions, elle prépare sa nouvelle oeuvre secrète pour la Biennale de Venise. Elle attend avec ses amies artistes à l’entrée des checkpoints pendant des heures, dessinant sur le mur de séparation, en prenant l’art comme symbole de protestation.
Elle se réveillera un matin en ayant tout oublié, plus de nom, plus de métier, ne reconnaissant pas ce qui elle est. Étonnée par sa vie, elle va tenter d’y échapper et au personnage qu’elle s’est fabriqué. Ces deux femmes vont connaitre une expérience déroutante alors qu’elles incarnent des univers opposés qui ni ne se touchent, ni se mélangent.
On ressort de ce film avec l’impression d’une oeuvre d’une intense noirceur, que ce soit concernant la jeunesse, les questions de couple, ou les relations professionnelles. Une jeunesse que Shira Geffen fait incarner par une jeune soldate qui ne donne aucun signe d’espoir. Geffen capture par ce moyen le sentiment de bulle qui entoure cette jeunesse, ignorer ce qu’il y à côté, ne pas haïr l’autre, simplement l’ignorer n’est ce pas pire ?
Peu de place à la cohérence
Le film perd en cohérence à force d’enchaîner les scènes absurdes, la logique du film disparaît pour aboutir sur un chaos qui rendra perplexe bon nombre de spectateurs. Plus le film avance, moins on trouve un espoir de voir une logique, un message quelconque. Il n’y a plus d’intrigue possible, le conflit n’est qu’un panorama, les soldats ne sont que de vagues personnages.
Self Made laisse sur sa faim, les images y sont superbes, les actrices brillantes sont à voir, la question du sens de la vie est plus que jamais d’actualité. Mais la réalisatrice semble trop miser sur le côté absurde et oublie d’assurer la cohérence de son oeuvre pour ne pas perdre le téléspectateur.