Sakiat Al Sawy, roue culturelle au bord du Nil

El Sawy Culturewheel

(‎El Sawy Culturewheel – ساقية عبدالمنعم الصاوي‎)

26th of July street, Zamalek

Un espace délaissé sous le pont qui relie Zamalek de Muhadissin et un éclair de génie, c’est ainsi qu’est née Sakiat Al Sawy. À peine rentré dans l’espace culturel, pied dans le Nil, on est rapidement pris par l’ambiance jeune et décontractée du lieu. Pendant que certains sirotent leur café, d’autres s’activent dans les multiples pôles culturels de l’espace. J’ai rendez-vous avec Essam Sherif, jeune interne en médecine qui a troqué sa blouse blanche contre l’habit d’assistant à la programmation pour occuper ses heures perdues. Après un tour des environs, nous nous asseyons dans les hauteurs de l’espace, sur une estrade en bois qui surplombe le Nil et offre une vue sublime à tous les amateurs de culture.

Aux origines de Sakiat Al Sawy

C’est en 2003 que l’ingénieur Mohamed El-Sawy décide de faire de l’espace délaissé en dessous du pont du 26 juillet un espace culturel pluridisciplinaire. Il le rebaptise alors en hommage à son père Abdel Moneim El-Sawy, écrivain égyptien et ex-ministre de la Culture. L’espace que je visite ce jour-là est la branche principale de Zamalek mais Sakiat Al Sawy possède un autre espace à l’école et Algeel Algadeed et une autre branche temporaire à Qena.

Sakiat Al Sawy deviendra ainsi le premier complexe d’espaces culturels privé indépendant en Égypte, accueillant des artistes de tous les bords et impulsant un réel mouvement pour la promotion de l’art indépendant. Sakiat Al Sawy sera notamment le premier espace à accepter les groupes de métal pour des représentations et de nombreux groupes de hip-hop aux paroles contestataires y trouveront aussi un exutoire. C’est par exemple le cas de Revolution Records, que nous avons d’ailleurs rencontré à Alexandrie durant notre séjour.

Une roue culturelle d’activités

Essam m’apprend que, depuis son ouverture, l’espace ne désemplit pas. Il a comblé un réel vide dans l’événementiel culturel et permis d’organiser un grand nombre de conférences, festivals et concerts. Avec une programmation pluridisciplinaire quotidienne et de qualité, l’espace entend créer chez l’Égyptien le réflexe de l’éveil culturel et l’habitude de consommer la culture pour faire vivre toute l’économie créative.

Parmi les activités phares de l’espace figurent un festival de théâtre, un festival de film d’animatione et de documentaires ainsi que des festivals consacrant la littérature arabe. En plus des concerts ponctuels qui ont accueilli des grands noms de la scène égyptienne et internationale (comme Cairokee, pour ne citer qu’eux), l’espace offre également des cours de dessin, sculpture, et musique. On y trouve aussi une bibliothèque, une salle de conférence, des salles de concerts et de multiples espaces adaptables aux représentations artistiques de tous les arts.

Exposer une dynamique créative indépendante de la révolution.

« Contrairement à certaines couvertures médiatiques simplistes , les artistes n’ont pas attendu la révolution pour se mettre à créer », nous confie Essam. « Preuve en est, l’existence de cet espace depuis 2003 », ajoute-t-il.

La révolution n’a fait que rendre accessible ce langage artistique à une plus large frange de la population.

Pour lui, « la révolution a tenté de démocratiser le renouveau artistique et, ce faisant, a permis de changer la perception des gens à l’égard de ces disciplines ». Il m’avoue alors en riant « Avant la révolution, mon père aurait été sceptique quant à mes activités artistiques, maintenant il est un peu plus rassuré ».

En parallèle de son travail pour Sakiat Sawy, Essam a d’ailleurs participé à la mise en place du projet Ana Masry. Créée en 2005, Ana Masry foundation est une véritable plateforme pour exposer la culture égyptienne dans toute sa diversité et enrichir la vision caricaturale qu’en font les médias.

« La culture égyptienne c’est à la fois les musulmans et les chrétiens coptes, les nubiens, les berbères de seewa, l’héritage pharaonique et bien d’autres choses encore », me lance Essam avec une vive lueur dans les yeux.

Pour consacrer tout ce syncrétisme, Essam et une dizaine d’autres jeunes se sont impliqués dans la promotion des visages d’Égypte au sein du territoire national mais aussi auprès de la diaspora. Et ce, à travers un groupe de musique, des livres pour les enfants, de la production audiovisuelle et une série de conférences et de cours.

https://www.youtube.com/watch?v=7QkNM0W17CY&list=PLFAZwWnzdTE2Xixh9C8nza9fgUigMwiD7

Une Égypte plurielle, au coeur battant, frémissant de la volonté de transmettre sa richesse et ses talents. C’est cet esprit que l’on ressent dans les couloirs de Sakiat Al Sawi.

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