Une odeur de grillades fumantes se dégageait hier de chacune des maisons de mon quartier. Le pays est en léthargie depuis la veille car c’est l’Aid el-Kebir. Nous nous sommes donc autorisés une demi journée de pause à passer en famille.
Mon passage au Port-Lyautey a duré seize heures. Tout juste le temps pour moi de dormir au son de moutons bêlants qui se répondaient toute la nuit en refrain comme s’ils prévoyaient leur génocide du lendemain et de me réveiller de bon matin pour m’empiffrer de brochettes de foie.
Sac au dos à nouveau, je m’empresse de me rendre à la gare ferroviaire de Kénitra. En ce jour de fête et en l’absence des nombreux étudiants et fonctionnaires habitués à faire la navette, les trains rapides pour Casablanca sont réduits. Mais, cette fois, les quelques trains prévus sont bel et bien ponctuels.
Une fois à Casablanca, Mehdi nous attendait au quartier Maarif, qui nous a surpris par son calme inhabituel. Comme tous les magasins étaient fermés, ce quartier de Casablanca ressemblait à un centre commercial géant à terrasse ouverte et sans chaland. Seule la force des couleurs des graffiti qu’on croisait sur notre chemin nous fit sortir de notre impression de nous balader dans une maquette des Sims.
On rejoint par la suite Mohamed Fariji et Léa Morain au Boulevard Bir Anzarane avant de prendre la route pour leur atelier à Bouskoura.
A 30km de Casablanca, un havre de paix s’ouvrait à nous. Après les visites et présentations officiels de l’Atelier de l’Observatoire, nous nous sommes attablés avec ce couple harmonieux, en profitant de l’air pur et de l’horizon de verdure infinie qui s’offraient à nos narines et à nos yeux.
Bien établis à Casablanca, Mohamed, natif de la ville, et son épouse entretiennent de très bons rapports avec les artistes qu’ils côtoient. Accueillants et chaleureux, l’on se sent rapidement appartenir à leur famille et il est difficile de les quitter après les avoir rencontré.
Quelques heures plus tard, Abdelmajid Kellou nous rejoint. Ce jeune algérien s’est installé au Maroc depuis plus de quatre ans et aspire à une carrière de cinéaste. Après ses études de réalisation à l’ESAV, il occupe le poste de responsable du jeune public à la Cinémathèque de Tanger et co-réalise Club Med. Ce documentaire de création retrace la mésaventure de Faouzi, un sans-papier qui, après avoir passé 19 ans à Montpellier, se fait expulser par la « loi Sarkozy ».
Les discussions et les verres s’enchaînent, puis nous rentrons à Casablanca après avoir apprécié le bleuté intense et l’oranger pourpre qui se mêlaient dans un ciel au moment sans pareil du coucher.
Ce matin, on s’est rabattu sur le premier restaurant ouvert. Tant qu’on avait quelque chose à mettre sous la dent, nous nous sommes épargnés les commentaires sur la qualité des mets. Heureusement, Lisa Dali nous a rejoint.
Souriante et débordante d’énergie, Lisa avait cette souplesse de corps et des expressions qui caractérisent les danseurs. Jeune franco-marocaine, elle anime des ateliers de danse et d’improvisation. Lisa préside l’association Irtijal qui s’active et tente de réunir les acteurs artistique, culturels et sociaux. Pour cette rentrée, la plateforme publiera son premier numéro du magazine Kifache, ambitionnant de faire la promotion du partage d’expérience et de connaissance à la communauté marocaine.
Le collectif Irtijal, organise chaque année la Jam Kabira (grand jam), activité phare organisée pour marquer le début de son activité. Lisa nous montre la captation de la soirée « Jam Irtijal », une séquence qui ne manque pas de porter des fourmillements à nos pieds.