C’était une après-midi venteuse que celle du dimanche 2 octobre. Une de celles qui poussent à se réfugier dans des intérieurs pour en apprécier la chaleur. Ceux qui s’étaient donnés rendez-vous au Théâtre municipal de Fontainebleau ne pouvaient que se réjouir d’y faire la rencontre de la voix réchauffante de Jahida Wehbe.
Le Caire des lumières, une création du festival Ile-de-France :
Pendant plus d’une heure, le public a pu se délecter d’une voix qui fait durer l’exaltation du plaisir. Dès son entrée sur scène, l’interprétation de la poésie amoureuse de Sayyed Darwich, « Ahou dalli sar » suivie d’un Mawal du mystique Mansour al Hallaj enflamma la salle. Des applaudissements de tonner retentirent dans les quatre coins et petit à petit, des voix se libérèrent pour accompagner chaque refrain entonné par l’artiste.
Sous la direction d’Elie Maalouf, ce spectacle qui s’inspirait de l’âge d’or de la musique arabe et qui en interprétait les classiques, a pris une tournure contemporaine mirifique. Les doigts virevoltant sur son piano, Elie donne à entendre tous ces hymnes indémodables de la musique arabe d’une autre oreille. Une palette de sons tout aussi subtile qu’étonnante se dresse avec une dextérité telle qu’aucun spectateur n’est résolu à quitter la pièce. Une autre chanson, puis une Nème, le souvenir en noir et blanc des divas orientales hante tous les esprits. Enivré par les mélodies; « une dernière chanson d’Asmahan… du Oum Kalthoum ! Oui, Fayrouz… », ne cesse de quémander la salle. C’est le moment de la tombée du rideau.
L’introduction de Robert Solé :
Mais avant d’avoir pu se délecter de cette noble création, l’auditoire a pu s’initier à la période de la renaissance de l’art musical arabe lors d’une conférence didactique donnée par l’auteur d’ Hôtel Mahrajane. L’occasion de découvrir le parcours de l’astre de l’Orient ou encore le tumulte de la vie d’Amal al Atrach.
Robert Solé a pu ainsi exposer l’historique artistique de cette ville qui s’est longtemps érigée en tant qu’épicentre culturel du monde arabe, le Caire. Dans un contexte de renouveau et de modernité, la capitale égyptienne offrait toutes les conditions favorables à l’épanouissement de nouveaux genres musicaux et exerçait un grand pouvoir d’attraction de tous les jeunes talents de la région.
L’usage d’une langue élégante et intelligible par tout le monde, le développement fulgurant du cinéma et le retour d’une élite intellectuelle de l’occident, munie de nouveaux savoir et de compétences, sont tous des facteurs qui favorisèrent cette renaissance culturelle. De grands noms apparaîtront alors au grand jour, à l’instar de Mohammed Abdel Wahab qui, pour mettre en musique les poèmes du prince des poètes Ahmed Chawqi, s’est laissé inspirer de musiques du monde diverses et a introduit à la musique arabe des instruments nouveaux (castagnettes, violoncelle, contrebasse…). Une innovation qui était loin de faire l’unanimité en son temps, mais qui finit par l’élever au rang des maitres.