C’est l’ultime livre de Nabile Farès, publié à titre posthume en 2017, un an après sa disparition. L’auteur scrute et interroge l’Histoire, l’islam, les religions et l’humanité sur ses épisodes les plus sombres du passé.
C’est avant tout un récit (plus qu’un roman) d’une rencontre intellectuelle puis affective, entre deux personnages miroir, mais aussi entre deux cultures adjacentes qui se côtoient, s’affrontent et se réinventent au fil du temps.
Sans perdre son regard de psychanalyste, l’écrivain s’interroge beaucoup sur l’origine et le commencement de choses, des conflits, mais aussi des petits moments de bonheurs qui donnent du sens à toute une vie.
Les pages sont chargées de dialogues, faites de questions et de réponses, principalement entre des personnages clés. Il y a Rachel, française convertie au judaïsme par empathie pour la souffrance du peuple juif. Puis Ahlan Blech, algérien d’une éducation musulmane, qui dans un sens, revendique et se réapproprie son identité judaïque. Nous aurons l’impression que leurs voix se mêlent et se confondent. A des moments, on ne sait plus qui dit quoi à qui, on ne retient que le sens des choses qu’ils abordent.
Avec des phrases qui tantôt, s’allongent et s’étalent sur trois pages et nous vident les poumons, et tantôt qui ont le rythme rapide d’une rafale de mots ponctuée de virgules causant panique et stress. Le style de ce roman est à couper le souffle dans son sens le plus littéral.
Le roman aborde un éventail de thèmes, qui sont tour à tour évoqués et décortiqués, allant de la guerre mondiale, les massacres, le colonialisme, la guerre d’Algérie, l’esclavagisme et l’antisémitisme. Il incarne une grande capacité d’empathie et de compréhension.
Tu n’iras pas piétiner le cœur, la terre, l’amour des autres gens, des autres personnes, tu resteras tranquille, vigilante, pas sourde…
Dans l’ensemble c’est une lecture facile mais indigeste. Les phrases restent dures à mâcher et à absorber. Ça reflète parfaitement la lutte que vit l’auteur, un combat contre la mort, sa propre mort. Ça arrive presque comme une prémonition de son propre décès, dont les prémisses et les symptômes se sont annoncés antérieurement. Nabile Farès, nous a quitté le 30 août 2016.