Le journal de Mawazine #5 : Don Bigg : Il n’existe pas d’infrastructure culturelle au Maroc

C’est à un Don Bigg très généreux, très à l’aise mais aussi très intéressant auquel nous avons eu droit ce matin en conférence. L’artiste profite cette année de son retour au festival Mawazine pour nous présenter un bouquet de jeunes rappeurs avec lesquels il vient de collaborer sur sa dernière mixtape et qu’il désire mettre en avant ce soir devant un public slaoui qui viendra certainement l’applaudir en masse.

On a donc eu droit à la présence de Papi Mouchkil, Masta Flow et Dizzy Dros pour ne citer qu’eux. On pourrait dire sans gêne que ce matin a eu lieu la conférence la plus intéressante du festival jusque là. Questions perspicaces et volonté de partager en toute sincérité étaient au rendez-vous.

Don Bigg  a évoqué plusieurs sujets lors de sa conférence, on en citera notamment le printemps arabe (sujet très récurrent dans les conférences des artistes arabes cette année) et comment il devait être traité différemment dans les pays qui ont vécu la révolution. Il insistait sur le fait que les conditions n’étaient pas les mêmes partout et que les artistes ne devaient pas s’emporter pas un élan d’uniformité en copiant sur leurs collègues dans les autres pays. L’artiste a aussi évoqué ses engagements, les différentes thématiques qui reviennent dans ses textes, comme la marginalisation des jeunes, de la culture rap et la pauvreté. Il a aussi parlé de sa participation à la marche contre la pédophilie en tant que père et a annoncé qu’il préparait une chanson sur cette thématique qui lui tenait beaucoup à coeur.

Don Bigg est aussi un ambassadeur du multiculturalisme et a insisté sur le fait qu’il ne fallait pas se coller une étiquette en référence à un territoire pour produire sa musique et qu’il fallait dépasser les limites géographiques pour puiser son inspiration de partout. Il a ainsi évoqué Abdelwahab Doukkali à titre d’exemple, étant un artiste marocain qui a beaucoup puisé dans la musique classique pour produire une musique arabe très contemporaine et avant-gardiste.

Le rappeur est aussi revenu sur le rapport qu’il entretient avec Mobydick en disant qu’il appréciait énormément sa musique, mais comme partout dans le monde, ce dernier a essayé de l’attaquer pour faire le buzz mais que Don Bigg ne lui répondra simplement pas, étant au delà de ces choses.

L’artiste est aussi revenu sur la situation culturelle de la culture au Maroc, insistant sur le fait qu’il n’y avait pas de véritable infrastructure culturelle au Maroc, ce qui fait que les jeunes artistes peinaient à percer et encore moins à vivre de leur art, cela dû au manque de tournées et à la difficulté à commercialiser leurs disques.

On posa aussi des questions à Bigg sur le langage cru qu’il utilise dans ses chansons, ce dernier répondra qu’il ne fait pas dans les insultes gratuites et qu’il appelle simplement les choses par leur nom. Parler d’un sujet cru se fera donc logiquement dans un vocabulaire cru. L’artiste a rappelé dans cet élan qu’il ne rédigeait pas des manuels scolaires, mais qu’il s’adressait à un public majeur et averti.

Don Bigg a terminé sa conférence en insistant sur le fait que les jeunes devaient s’assurer un cursus scolaire stable avant de s’adonner à leur passion pour se garantir un avenir, vu que l’art au Maroc n’est pas encore capable de leur offrir ce luxe.

Photo : la page Facebook du festival Mawazine

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