D’un geste vif, Jawhar Soudani pousse la porte de Liber’thé avant de nous chercher de ses yeux amusés. Il nous repère entre les tables tumultueuses de ce café culturel du quartier de Lafayette et avance vers nous en bondissant légèrement.
Heureux virage vers le street-art
Jawhar plus connu sous l’acronyme VAJO (Visual art by Jo), a posé ses premiers tags à l’âge de 12ans. Depuis, il ne quitte plus ce monde de signes urbains et y apporte ses propres couleurs. Originaire de Gabess, Va-Jo quitte le sud tunisien pour poursuivre un parcours en design graphique. Une fois à Tunis, sa dynamique et son sens du relationnel, flagrants, lui permettent d’enchainer des expériences variées. D’expositions en tournage de film en passant par la création d’une marque, Va Jo ne manque ni d’idées ni d’ardeur.
Sa passion pour le lettrage et l’esthétique des lettres s’est laissée influencer par ses études. Résultat : un heureux virage vers le Street Art. Ses sprayages de bombes bigarrés lui permettent d’ailleurs de poursuivre sa migration vers le nord, en prenant part à de nombreuses manifestations à l’étranger. Après une exposition à la Maison de la Tunisie à Paris, une participation à un festival de Street Art au métro de Copenhague, Va Jo expose son art à Portland.
En résidence dans l’Oregon pendant 6 mois, son séjour aux Etats-Unis ne l’a pas laissé insensible. Au pays de l’oncle Sam, il anime avec l’association Rise UP des ateliers de Street Art à destination des enfants.
Pour des murs chatoyants
Enfant, c’est d’ailleurs comme ça que se décrit Va Jo. Ses personnages de monstres récurrents donnent l’impression de s’être tout droit enfuis d’un studio de dessins animés. Chamarré et plein de vie, l’univers de Va Jo est fidèle à sa personne, débordant d’énergie.
Curieux, le graffeur touche à tout. Cartons ou papiers, tous les matériaux semblent propices pour Va Jo. À main levée, il exécute des dessins rapides et précis et en fait voir de toutes les couleurs. Sans contours préalables ou croquis préparatifs, dès que Va Jo se confronte au mur, il le conquiert. Il se laisse imprégné par les lieux et en fonction de ses états d’âme, laisse son imagination se débrider. Le personnage d’humeur jovial que nous avons rencontré ne pouvait que nous confier :
« J’aime les choses vives et j’ose utiliser la couleur pour en finir avec le teint fade de ce qui m’entoure ».
Va Jo se plait ainsi à raviver les façades beiges et pâles qu’il croise, mais aime aussi les utiliser comme porte-voix. Exposés au public, ces murs sont des supports de communication sur lesquels il n’hésite pas parfois à marquer des slogans. Les fresques de Va Jo captent souvent l’attention. Même lorsqu’il aborde des problèmes sociaux, le street-artiste n’abandonne jamais son approche amusée et « funky », comme il aime la décrire.
Une manière pour lui d’ouvrir le débat sur des sujets qui touchent à la liberté. En tant qu’artiste urbain, Va Jo voit aussi son rôle comme « critique et décrypteur graphique qui amène à discuter des problèmes sociaux en les décomplexifiant ».