Nous avons rendez-vous avec l’équipe de High Dam dans leur tout nouveau studio, The Empire à Sidi Gaber. Après the Y-Crew, c’est la deuxième équipe de musiciens que nous rencontrons dans l’espace fraîchement ouvert. Accueillis par les huit membres du groupe réunis pour une répétition, nous sommes invités à les rejoindre dans une salle pour une immersion intimiste dans leur musique.
Dès les premières notes, nous sommes emportés par les sonorités des percussions nubiennes fusionnées à la basse et à la batterie et nous ne pouvons qu’être captivés par les voix de Hassan Jamaica qui répond à celles de Louai et d’Ahmed Remo le sourire aux lèvres. En chantant, Hassan met sa main sur le cœur et son sourire cherche celui de chaque membre du groupe.
Au gré de percussions de plus en plus rapides et saccadées, son sourire s’élargit et les regards se croisent entre les membres du groupe. Une vraie fusion musicale semble opérer, à la fois entre les générations, les couleurs, les styles, les langues et les esprits.
Retour sur une rencontre musicale
Issu de la scission d’un groupe de musiciens plus large, High Dam est né en 2010 autour de huit musiciens : Hassan Jamaica (vocaliste) MR.Booney (Guitariste) Fayrouz Kaddal (Flute) Loai El Nakib (Vocaliste et pianiste) Ahmed Remo (Guitariste) Ahmed Khairy (Percussionniste) Mohamed Gomaa (Percussionniste) et Karem Mahmoud (Batterie).
Ayant tous une origine nubienne, les membres du groupe High Dam revendiquent fièrement leur appartenance à cette culture encore peu mise en valeur dans le pays. Tous nous racontent, les uns après les autres, des anecdotes personnelles qui les ont amener à justifier leur appartenance à l’Égypte pour la simple raison qu’ils ont une peau plus foncée. Pour eux, ces réactions sont le fruit d’une ignorance d’autrui, qu’ils ont choisi de combattre par leur art.
« C’est une musique qui existe depuis l’époque des Pharaons et qui est très riche. Il n’y a pas un seul dialecte nubien mais des centaines de dialectes différents qu’il faut protéger de la disparition en les faisant connaitre au grand public ».
Dans leur pratique musicale autant que dans les paroles, le caractère nubien du groupe est une empreinte qu’ils veulent défendre haut et fort, sans avoir pour autant des messages politisés. En arabe et en nubien, les vocalistes de High Dam entonnent un message de paix qui consacre la multiculturalité de l’Égypte.
Dans une de leurs chansons, on peut entendre la phrase « Ana Nubi, Masri, African, Arabi », exprimant justement la place de la culture nubienne dans la mosaïque égyptienne et au-delà. L’idée de High Dam n’est pas puriste. Au contraire, le groupe préfère fusionner la musique ancestrale avec des reflets modernes, afin de la rapprocher du public actuel.
Après la scission du groupe initial, High Dam fera sa première performance le 7 juillet, à l’occasion du jour international de la culture nubienne.
Pour l’instant, High Dam utilise principalement le canal des réseaux sociaux pour faire connaitre sa musique. Un album est cependant en cours de préparation et un projet en collaboration avec l’Unicef verra peut être le jour.
Avec un nom qui évoque paradoxalement le barrage responsable du déplacement de communautés nubiennes, High Dam assume ses prises de positions à l’égard de cette culture qu’ils ne veulent pas voir disparaître de la mémoire collective égyptienne. High Dam est donc un barrage musical à l’oubli et à l’ignorance de l’autre, construit avec une fusion de voix et un ciment d’instruments.