A Arabesques, le Cabaret Tam Tam ressuscite l’histoire d’un Paris oublié

Cabaret Tam Tam

Un samedi soir au Festival Arabesques. Après avoir vibré avec la fusion instrumentale franco-égyptienne de Egyptian Project, nous flânons devant les chapiteaux du Domaine d’Ô.

De la large enceinte de l’amphithéâtre nous parviennent des notes musicales entrecoupées d’éclats de rire. Quelques pas plus tard, nos yeux s’ouvrent sur la scène où le cabaret Tam Tam a planté son décor.

Très vite, nous comprenons que « Tam Tam » n’est pas seulement un hommage au fameux instrument à percussions. C’est aussi une allusion à la fusion des musiques et des cultures de Tunisie, d’Algérie et du Maroc. Une fusion dont le Paris du dernier siècle a été le théâtre, puisque le cabaret Tam Tam a réellement existé et a longtemps animé la rue Saint Séverin dans le quartier latin.  Comme nous l’apprend le spectacle, ce cabaret a en fait appartenu à Mohamed Ftouki, le père de Warda al-Jazairia et a accueilli de nombreuses vedettes de la chanson arabe, comme Safia Chamia et Farid El Atrache.

Ce soir-là, hommage est ainsi rendu à ces nombreux cabarets orientaux qui ont fait les nuits parisiennes jusque dans les années 80. Ils s’appelaient la Koutoubia, le Bagdad ou El Djazaïr. Ils enchantaient le tout-Paris dans des bâtisses qui ont aujourd’hui cédé leur place aux restaurants grecs.

CCK – Clic Clac Kodac -, réel Monsieur loyal de la soirée, nous narre cette histoire avec la complicité du personnage d’Andalousia, née de l’union d’un videur de cabaret et d’une danseuse du nom de Nedjma. Les anecdotes de CCK sont illustrées par des chansons du répertoire maghrébin. Il y en a pour tout les goûts, de Samir Hallali en passant par Warda, Cheikha RimittiBahia Farh ou encore Akli Yahyaten.

 

Dès la première chanson, dès la première note de Oud, la magie opère. Avec le refrain entêtant « Ahlan wa Sahlan », la chanteuse, accompagnée de musiciens, nous souhaite la bienvenue tandis que les plus téméraires se dirigent déjà sur la piste de danse. CCK, notre narrateur, nous invite à ne pas venir comme nous sommes mais  plutôt « comme nous nous rêvons ». Le ton est donné, les chansons défilent et la piste de danse se fait de plus en plus animée.

Avec cette troupe, nous sommes conviés à une fête à ciel ouvert qui célèbre les couleurs du Maghreb, ses chants, ses femmes et la pluralité de ses cultures. Un hommage est rendu à Djamila Bouhired, célèbre combattante Algérienne, en l’honneur de laquelle un poème est déclamé. Cette rétrospective musicale est donc un prétexte pour retracer les jalons de l’Histoire de la décolonisation, du panarabisme et de l’immigration en consacrant leurs traductions culturelles. Les thèmes sont universels, les femmes, la mer, l’amour… et ils se mêlent à l’histoire d’Andalousia, qui redécouvre la culture de ses parents et se révèle. Pour les plus profanes, des écrans géants diffusent des portraits des chanteurs accompagnés de petites notes biographiques, des images d’archives ; quelques paroles qui alimentent la curiosité qui a guidé tout le monde jusqu’ici.

Pendant les deux heures, quatre danseuses se passent la main pour exhorter le public à les accompagner, le groupe nous introduit à un corpus musical varié et efficace auquel se mêlent des youyous qui fusent régulièrement dans l’enceinte de l’amphithéâtre noir de foule. Le tout se termine donc comme il a commencé : en danse et en chanson, ressuscitant ainsi l’âme de cet âge d’or des cabarets orientaux qui semble être restée intacte.

Article écrit par Léa Vicente. Avec la participation de Hajar Chokairi et Oumayma Ajarrai.