Cold cuts est un magazine photo lancé par le photographe et réalisateur Mohamad Abdouni. Il a choisi de documenter les communautés arabes queer. Basé à Beyrouth, le magazine permet d’offrir une vue et un angle direct sur ces communautés, différents du prisme des médias occidentaux lorsqu’ils se penchent sur ce sujet.
Le travail de Mohamad Abdouni sert également d’archives pour toute une culture, des événements, et tout simplement le quotidien de cette communauté. A ce titre le magazine Cold Cuts se décrit comme un témoin pour les générations futures des personnes LGBT vivant au Moyen-Orient ou faisant partie des diasporas arabes.
Rencontre avec le fondateur de Cold Cuts, Mohamad Abdouni.
Comment est né Cold Cuts ?
J’avais une publication entre 2012 / 2014 sur l’art et la culture au Moyen-Orient. C’était un projet sur 2 ans et dès que j’ai fini j’ai voulu y revenir parce que j’adore ça. S’occuper d’une revue papier, c’est passionnant. Les débuts se sont faits en mars 2017 et nous n’avions pas du tout d’idée spécifique de thème. On voulait partir d’une création vierge en quelque sorte. C’était un peu comme un bébé qui arrive dans une vie et qui grandit. J’ai commencé à contacter des gens que je connaissais dans plein de domaines différents, des gens dont j’aimais vraiment le travail. Je voulais créer des espaces visuels d’expression pour les artistes, pour montrer leurs œuvres. J’ai par exemple contacté Tony Hajj. C’est un photographe expérimenté dont je suis complètement fan. Il a notamment beaucoup travaillé à Paris. Mais je voulais surtout des photos qu’il n’avait pas déjà publiées. Nous avons eu de la chance, cela a été possible et j’en ai été très heureux.
S’il n’y avait pas de thématique à l’origine, c’est finalement devenu une publication queer. Comment ?
Même pendant la mise en place et la construction du magazine on avait pas du tout ça en tête. On a construit par volonté artistique dans une seule démarche : montrer des choses belles et intéressantes. Le seul texte écrit et journalistique est de Michelle Wazan. Il parle des drag-queen de Beyrouth qui ont commencé à faire des performances publiques dans des clubs. On a choisi de le découper et de le parsemer partout dans la publication. Une fois que la première édition a été publiée, les médias étrangers ont commencé à trouver les communautés arabes queer sexy. Ça a commencé à intéresser un peu tout le monde. On a pris du recul et on a réalisé que notre magazine s’inscrivait dans un mouvement queer et artististique. Tout, en fait, en est pétri, les photos, les textes etc. La publication avait pris la main sur nous en quelque sorte, elle avait sa propre vie. C’est très différent maintenant pour le second numéro.
Pourquoi avoir fait le choix de publier en trois langues (arabe, anglais et français) ?
Ces trois langues c’est “very beirut” (rires). C’est juste qu’ici tout le monde parle une, deux ou bien même trois de ces langues. Je voulais vraiment que les gens de Beyrouth puissent comprendre le texte, c’était l’idée au départ. C’était important que la publication ait une source ici. Ce n’est pas une vision occidentale d’une communauté ou d’une culture. La démarche est donc très différente et il fallait que cela se comprenne aussi dans les langues choisies.
Pouvez-vous nous parler un peu du second numéro ?
Alors, le numéro 2 sortira en principe automne 2019. Le contenu est prêt, c’est juste une question de finalisation et de réunir les fonds pour l’impression. Nous ne sommes pas un magazine classique avec un calendrier de publication strict. Nous prenons notre temps, car en plus ce n’est pas notre job. Nous faisons ce projet avec passion, avec nos propres moyens.
Dans le second numéro, nous touchons à beaucoup de sujets différents. Par exemple, les familles et les personnes LGBT. Nous parlerons également de Katy Jalili, une activiste iranienne qui organise à Londres des soirées queer pour les femmes “racisées”. C’est très controversé bien sûr, mais intéressant et c’est pour cela que nous voulons en parler.
La une sera-t-elle aussi “choquante” que celle de la première publication ?
La une sera désignée de façon très différente par rapport au numéro un. D’ailleurs tout sera différent. C’est simple, à part le poids et la taille, tout change !
Après pour la partie choquante… eh bien disons que oui (rires). Dans un genre très différent encore une fois, mais ce sera drôle et intéressant, ça c’est le moins que l’on puisse dire !
Retrouvez Cold Cuts sur Insta @coldcutsmagazine