CairoComix Festival : la bande dessinée a aussi une vie en Egypte

Pendant trois jours, l’Université américaine du Caire a accueilli la troisième édition du CairoComix festival, consacrée à la bande dessinée. Un moment idéal pour prendre le pouls de la scène égyptienne.

Expositions, stands d’artistes et d’éditeurs, caricatures en direct, concerts, conférences, séances de dédicaces… Les 22, 23 et 24 septembre derniers, le campus américain du Caire s’est habillé aux couleurs du CairoComix festival qui se définit comme « une célébration artistique qui réunit le public égyptien avec des artistes de bande dessinée locaux et internationaux et remet pour la première fois de nombreux prix comme celui du meilleur roman graphique publié en arabe. ».

Un 9ème art qui s’émancipe

Très populaire en Égypte, la production de bande dessinée dans le pays a pourtant été pendant longtemps réservée aux enfants. Mais, dans les années 2000, en particulier avec la sortie en 2008 de Metro de Magdy El Shafee, qui signait alors le premier roman graphique égyptien, la bande dessinée égyptienne a cessé d’avoir un caractère exclusivement enfantin.

Les histoires dessinées destinées aux adultes se sont alors multipliées sur papier mais également en ligne. Dans la foulée, juste après la révolution de 2011, de nombreuses initiatives ont fleuri.

 

Des magazines dédiés comme TukTuk ou Garage ont vu le jour, l’organisme Mazg, qui agit pour la promotion et le développement de la bande dessinée dans toute l’Égypte, a été créé et par la suite des événements comme le CairoComix festival ou l’Egypt Comix Week, dont la quatrième édition est prévue pour décembre 2017, sont nés.

50 femmes et bien plus

En déambulant dans les jardins du campus américain du Caire, amateurs de bandes dessinées, curieux et fans, ont pu partir à la découverte de l’univers de plus de 80 artistes dont de nombreuses femmes, très représentées à cette occasion.

Parmi elles, la caricaturiste Doaa El Adl. Lauréate de plusieurs récompenses, elle était présente pour la signature de son dernier ouvrage Cinquante bandes dessinées et plus sur les femmes. Cet « album de photos », comme elle le surnomme, rassemble plusieurs de ses dessins réalisés ces dernières années dans le cadre de collaborations avec des organisations féministes en Egypte mais aussi à l’extérieur.

Un recueil de caricatures auquel elle a ajouté des inédits qui abordent les lois discriminatoires à l’égard des femmes. Un sujet qui, comme elle l’explique en introduction son livre, n’a jamais été abordé dans les caricatures égyptiennes. Mariage de mineures, adultère, excision, violences envers les femmes… De nombreuses lois sont explicitées et illustrées par la caricaturiste dans cette dernière partie de l’ouvrage.

La jeune dessinatrice égyptienne Deena Mohamed, qui est déjà une habituée du festival, était également présente cette année. Sa super-héroïne Qahera avait remporté le prix de la Meilleure bande dessinée numérique lors de la première édition du CairoComix. Qahera est une série de 8 histoires courtes qui abordent la condition de la femme en Egypte et en particulier le harcèlement sexuel.

 

 

 

Mais cette fois-ci, Deena Mohamed était surtout là pour parler de son roman graphique Shubeik Lubeik qu’elle présentait pour la première fois. Une bande dessinée qui lui a valu de remporter cette année le prix du Meilleur roman graphique publié en arabe.

 

 

 

 

Des chameaux qui passent à travers une porte, le corps d’une danseuse du ventre ou encore des moustaches différentes associées à des ciseaux de forme adaptée… L’artiste Farah Shafie présentait, quant à elle, sa collection de dessins humoristiques illustrant des proverbes populaires égyptiens qu’elle a rassemblés dans un ouvrage dédié. Une manière pour elle de perpétuer la culture égyptienne et ses expressions uniques.

Les femmes n’étaient, bien entendu, pas les seules à l’honneur. Comme le caricaturiste égyptien Makhlouf, le dessinateur Mohamed Salah ou encore l’éditeur Josh O’Neill, les hommes étaient nombreux au rendez-vous.

Le plus égyptien des dessinateurs et auteurs de bande dessinée français, Golo, était également de la partie pour la sortie de son nouveau livre Istrati! présenté en avant première ce dimanche 24 septembre dans le centre ville du Caire, à paraitre en octobre 2017 aux éditions Actes Sud.

 

Ce premier tome sur la vie du roumain d’expression française, Panaït Istrati, retrace les périples de cet auteur-voyageur, et en particulier son voyage dans l’Égypte du milieu du XXème siècle. Une bande dessinée sur le vagabondage, le voyage, mais aussi sur l’amitié, comme l’expliquait Golo lors de son intervention dans les bâtiments de l’Université américaine du Caire.

 

 

Véritable marqueur de la vitalité de la bande dessinée en Égypte, le CairoComix Festival proposait une programmation étoffée et variée, à l’image de cette scène égyptienne en plein essor. Chaque anée, cet événement prend un peu plus d’ampleur et est en passe de devenir un rendez-vous incontournable du 9ème art.

 

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