Boa Mistura rend à la Casbah d’Alger sa karama

Né en 2001 à Madrid, BoaMistura est un collectif d’artistes urbains qui ont choisi l’infinité vierge de l’espace public comme plan de travail. C’est en 2013 que Boa Mistura s’est engouffré dans les ruelles d’Alger avec le projet Al karama (dignité).

Boa Mistura (bon mélange en portugais) est composé de cinq artistes concentrés en grande partie sur le renforcement de la communauté avec la mission de redonner au monde sa couleur. Espagne, Afrique du Sud, Etats-Unis, Royaume-Uni, Brésil, Mexique, Géorgie, Norvège,  Serbie, Panama et enfin Algérie, tous ces pays ont vu certains de leurs  espaces délaissés et abandonnés reprendre vie grâce à leur coup de pinceau.

La vieille ville d’Alger, malgré avoir été déclarée site du patrimoine mondial par l’Unesco en 1992, est de nos jours très détériorée. Surnommée La blanche en raison de la couleur dont ses édifices étaient peints autrefois, la casbah est d’origine ottomane et a été construite sur une colline divisée en deux : une partie haute et une autre basse. Elle a été l’épicentre de l’islamisme actif et est devenue l’un des endroits les plus brûlants de la ville, spécialement au cours de la décennie noire qui a secoué le pays durant les années 1990. La négligence et l’usure du temps ont effacé la couleur blanche de ses façades, et ses maisons sont à présent en train de s’écrouler.

Le pouvoir des mots

Boa Mistura a apporté de la vie et de la poésie à ces lieux, en faisant apparaître des messages là où on ne les attend pas. Au lieu de se contenter d’écrire des phrases sur les vieux murs, ils ont fait le contraire : ils ont repeint lesdits vieux murs d’un blanc éclatant, en ne recouvrant pas les espaces destinés aux messages. Ainsi, les textes prennent-ils corps dans la vieille peinture décrépite, ils existent comme une sorte de survivance du passé.

L’utilisation de la calligraphie arabe facilite aussi  la lecture et la compréhension de ces derniers par les habitants et les passants et reflète la facette arabe de la zone. C’est un choix louable de la part du collectif, que de vouloir rendre leur art intelligible et compréhensible par la population locale. Cela donne au caractère urbain de ce dernier toute sa dimension et le fait exister en toute finesse, sans violer l’histoire des lieux et l’identité de leurs habitants.

Faisant preuve de respect, les Boa Mistura sont intervenus de manière subtile : rendre son blanc à la ville et geler le temps d’une manière poétique, entre deux couches de peinture. Certains fragments sont compréhensibles mais d’autres peuvent à peine être devinés, créant ainsi un effet magique qui démontre le caractère éternel de ces derniers.

Avec des mots comme الحب (amour) et نحن نور (nous sommes lumière), ils résument leur séjour à Alger et l’impression qu’ils ont eue de la société musulmane. Ces messages inspireront donc quotidiennement toute personne passant à coté et lui rappelleront qu’elle a une valeur incalculable, quelque soient ses origines ou son lieu de vie. Cette action fait l’effet d’un cri. Elle est une prise en main concrète de la rénovation de la casbah, et assure sa pérennité.

Un commentaire

  • Lina Berbadj dit :

    J’adore le concept j’espère qu’on pourra voir ça dans Sid el houari à Oran ou encore Zighoud Youcef à canstantine qui eux aussi sont des fenêtres de la casbah qui malheureusement sont entrain de tomber mais dont l’architecture reste imprenable.

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