Il reste encore quelques jours pour se rendre à l’Institut des Cultures d’Islam et explorer la très belle exposition Regards posés sur la médina de Tunis organisée en collaboration avec l’association L’Mdina Wel Rbatine, Actions Citoyennes en Médina. Pour cette exposition, 19 photographes tunisiens et étrangers ont été invités à poser un regard sur cet univers aux multiples dimensions dans le cadre d’une mobilisation citoyenne. Les recherches ont permis de répertorier 50 hammams historiques, dont 26 en activité.
Au rez-de-chaussée du premier bâtiment, celui de la rue Stephenson, qui accueille aussi une salle de prière, on entre tout de suite dans l’intimité des hommes au hammam. Hamideddine Bouali, l’un des photographes de l’exposition en parle comme une « intimité à la fois réelle et policée » : un moment de plaisir avec soi-même, autorisé, encouragé par la société. On sent que Jacques Pion a su capter la relation à l’autre et la relation au corps au hammam El-Remmimi. Il est, d’ailleurs, intéressant d’observer la salle se remplir d’une foule de personnes à l’heure de la prière de 16h30 pour se rendre au premier étage…
En outre, ce travail collectif suggère une volonté de témoigner de ce patrimoine qui disparait. La dégradation de certains hammams coûte très chère en réparation et les propriétaires peinent à payer ces frais. C’est ce qu’explique l’un d’entre eux dans un court-métrage réalisé par les étudiants de l’École Nationale d’Architecture et d’Urbanisme de Tunis, présenté dans le deuxième bâtiment, rue Léon. Les propriétaires veulent garder l’intégrité des hammams – les lieux du social par excellence et refusent d’augmenter leur prix pour devenir des « spas ». Les hammams de la médina sont menacés de disparition si aucune action de sauvegarde n’est envisagée comme l’attestent ces clichés de Maroanne Catzaras.
Un ensemble de rites sociaux, de pratiques et de symboles sont attachés à ces hammams. Des mémoires les habitent, des histoires, des mythes où les djinns viennent rendre visite aux bains une fois la nuit tombée. On peut d’ailleurs écouter certains de ces mythes grâce à une installation audio et comprendre le sens que les habitants de la médina peuvent leur porter.
Cette exposition est aussi une invitation à visiter un lieu de culte et de culture de la ville de Paris, au cœur de la Goutte d’Or : le hammam est en réparation mais le café d’Ilam saura vous enchanter. De nombreuses conférences et activités y sont aussi offertes.