Pour son premier documentaire, Nabyl Ayouch décide de s’attaquer à un sujet aussi sensible que polémique : le conflit israélo-palestinien qu’il choisit d’approcher en confrontant deux mémoires. Celle de jeunes et moins jeunes palestiniens qui ont tout perdu et celle d’israéliens qui refusent, pour la plupart, de s’accrocher au passé. Préférant plutôt bâtir leur pays sur une terre qu’ils disent être la leur. Le réalisateur marocain organise donc une conversation par caméra interposée entre les réfugiés palestiniens et les Israéliens. Retour sur ce qu’il faut ou pas retenir de ce film-documentaire.
Le réalisateur marocain tient à l’annoncer d’emblée. « C’est aussi pour moi un sujet personnel » dira-t-il lors de l’avant-première. En effet, My Land s’engage clairement dans une voie autobiographique. Né d’un père musulman marocain et d’une mère juive d’origine tunisienne, Nabyl Ayouch a grandi entre deux rives et avec deux identités pas forcément conciliables et qui rappellent tristement le conflit israélo-palestinien. Il dit aussi qu’il a longtemps été contre toutes formes de relation avec l’Etat israélien. Car, selon lui, il ne pouvait y avoir que des agresseurs et des agressés. Israël était donc clairement un agresseur qu’il fallait boycotter. Il aurait fallu attendre l’année 200 pour que par un hasard des choses, le réalisateur finit par accepter une invitation à Tel-Aviv. Il y noue alors quelques contacts qui lui promettent qu’une fois le projet My Land abouti, différentes projections seront organisées à Jérusalem mais aussi en territoires occupées. Quoi de plus motivant pour partir en 2009 au sud du Liban pour filmer des réfugiés palestiniens.
« Immense pessimisme en la situation politique sur place mais aussi immense espoir en l’être humain ». Tels ont été les dires du réalisateur marocain, Nabyl Ayouch, lors de l’avant-première du documentaire à Rabat. Au-delà de la longueur exaspérante du film mais aussi des témoignages répétitifs, le projet d’Ayouch a le mérite de faire une ébauche à une toute nouvelle conception de la cause palestinienne : au de-là des noms, des batailles, des accords et des traités, le conflit israélo-palestinien c’est aussi des personnes et une mémoire collective qui tarde à se constituer. Une mémoire qui se rejoint dans le rapport des gens, quelle que soit leur origine, avec les lieux, les endroits et les habitations.
Mais ce qu’essaye de trouver le réalisateur, et en vain, c’est surtout la compassion des israéliens, jeunes ou moins jeunes, face à la souffrance des réfugiés palestiniens. Pour cela, il use des enregistrements qu’il a fait des témoignages des réfugiés du sud du Liban, qu’il leur présente. Ici on est en droit de se demander s’il est vraiment efficace que de vouloir nouer une relation interculturelle et intergénérationnelle avec un moyen de fortune comme celui-là. Car si le réalisateur cherche à aboutir à un échange d’émotions ou de sensations, il ne se retrouve hélas et souvent qu’avec des phrases toutes faites d’israéliens incitant les Palestiniens à ne plus s’accrocher aux souvenirs et au passé. Et c’est bien pour cela, qu’en plus de lasser par moments, le documentaire nous laisse vraisemblablement sur notre faim : on ne se retrouve qu’avec un constat pur et net de la situation actuelle qui émeut, en effet, mais qui n’aboutit pas à ce que le réalisateur aurait certainement voulu : un dialogue.
En pointant du doigt la mémoire collective, le réalisateur marocain démontre cependant qu’un dialogue est certainement possible, cela même si ce n’est pas qui a pu être réussi pour cette fois-ci. Quoi qu’il en soit, un témoignage d’une jeune israélienne permet néanmoins de sortir de la projection avec une idée motrice de nouvelles visions : » Les cœurs peuvent être trop petits mais pas les lieux « .
Visionnez la bande-annonce du film :
[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=KRQWR_GRGM8[/youtube]
L’initiative est à saluer parce que délicate. Mais d’après votre article, on sent que Ayouch prend le parti des Palestiniens dès le départ. Il est vrai qu’il s’agit d’un problème de mémoire mais n’est-elle pas aussi une mémoire juive? Ne s’est-on pas basé sur toute une Histoire religieuse pour fonder ce nouveau territoire? Et supposant que l’occupation israélienne n’a pas lieu d’être, que les crimes qu’elle commet sont sans le moindre doute injustifiables, ne voit-on pas que la division politique palestinienne contribue elle aussi à accroître ces crimes? Bref, parler aux gens ordinaires ne mènera pas à grand-chose si ce n’est qu’au discours victimisant ou accusateur. Ce documentaire aurait pu être meilleur s’il avait fait appel à des spécialistes, des professeurs d’Histoire à titre d’exemple (des deux côtés) pour embrasser l’ensemble, je ne dirais pas, du conflit mais de la « Discorde » (au sens religieux du terme) israélo-palestinienne.