A la découverte de la petite salle du New Morning, l’ambiance intimiste du concert de Mashrou’ Leïla nous laisse présager le meilleur. Sans première partie, résonne dans nos oreilles des morceaux divers de pop-rock arabe et occidental qui préchauffent nos esprits. La température commence à monter et notre bande de libanais se fait de plus en plus désirer. Jacques Lang est également présent, debout, fier comme un coq, devant la porte des coulisses. Sans doute réalise-t-il, comme nous, que, par la présence d’un public éclectique, la musique arabe n’est pas lésée. Elle renaît sous une nouvelle forme alternative.
Bahr commence à résonner et la foule s’enflamme dès les premières sonorités. Hamed Sinno dévoile sa voix sur ce titre de leur troisième album, sorti cette année, nous annonçant la couleur : nous sommes partis pour un voyage hors du temps. Le public est au rendez-vous, sur Imm el jacket. Le sentiment que tout ce beau monde a chauffé sa voix, avant le concert, est présent. Hamed n’est plus seul chanteur au New Morning.
La première partie du concert est un hymne à l’amour, d’Ala babu à Fasateen en passant par Shim el yasmine, El hal Romancy, Bishoof. Les sujets abordés nous enivrent, traduisant un fossé entre les mentalités et les traditions d’un monde arabe en mutation. Ces derniers s’accordent parfaitement avec un malaise sociétal ressenti par toute une génération, qui creuse sa place, dans un environnement en décalage avec ses enfants. La désinvolture, inspirée par le groupe libanais, envahit ces jeunesses arabes, qui s’y identifient. La volonté d’uniformiser en une seule catégorie la nouvelle génération de cette région est une bêtise. Mais si une chose les réunit, c’est bien ce désir de vivre, tout simplement, libre.
Non, Mashrou’ Leïla ne sont pas des princesses. Mais le manque de ventilation de la salle nous a tous plongé dans un sauna. Pause. Si la première partie était consacrée exclusivement aux chansons de natures calmes et mélancoliques, la deuxième partie était toute autre : beaucoup plus animée et dansante. Raasuk, Wa nueid, Lel watan, Taxi et autres chansons extraites de leur dernier album ont su faire danser ce public au cœur très oriental. Les chansons nous emportent les unes après les autres, faisant bouger notre corps à sa guise. Une ambiance beaucoup plus pop, beaucoup plus rock, Hamed dansait partout, sautait partout et ses interactions avec le public n’étaient jamais de trop.
Voilà, même en appréciant Mashrou’ Leïla, le coup de foudre peut s’opérer en live, où la voix profonde et le déhanché entraînant du chanteur, mais également le groupe à la pointe de l’originalité de chaque chanson, en font frissonner plus d’un.
Article réalisé en collaboration avec Abdelhalim Zaadoud.