Theeb ذيب est un film dramatique co-écrit et réalisé par Naji Abu Nowar. Sorti dans les salles en Jordanie depuis 2015, il se verra pour la première fois projeté en France, le 23 novembre prochain.
Le film se passe en 1916 dans la province ottomane du Hedjaz dans l’ouest de la péninsule arabique sous l’occupation britannique. Theeb (“loup“ en bédouin est interprété par Jacir Eid) a dix ans et vit dans un campement de bédouin en plein désert avec son grand frère Hussein (Hussein Salameh).
Une nuit, un officier britannique (Jack Fox) s’invite dans la communauté et Hussein est désigné pour le guider à la recherche d’un puits sur la route de la Mecque. Theeb va les suivre de loin car il refuse de se séparer de son frère et se demande quels mystères dissimule ce blanc qui vient d’un autre monde.
D’emblée, le décor est planté dans les couleurs de Wadi Rum, au sud de la Jordanie. Les équipes de tournage ont investi trois lieux différents : les plans avec la famille sont ancrés à Wadi Araba, une région frontalière, militaire, à proximité d’Israël ; la piste du pèlerinage a été filmée dans le Wadi Rum ; et le fort ottoman se trouve à Daba, à peu près 70 kilomètres au sud d’Amman.
Tourné par une équipe restreinte, Theeb a rassemblé une vraie communauté de Bédouins ayant accepté de se prêter au jeu d’acteurs. L’équipe y a passé plus d’un an afin de trouver une des dernières tribus nomades existant dans ce pays. C’est d’ailleurs grâce à celles-ci que les dialogues du long-métrage ont été écrits car le cinéaste voulait qu’ils soient faits dans le dialecte des Bédouins avec leur accent idoine.
C’était une collaboration où nous développions l’histoire avec les Bédouins […] pour aller chercher l’authenticité*.
Les grands espaces désertiques et l’intrigue du film ne nous laissent pas indifférents. Les plans nous rappellent le Lawrence d’Arabie de David Lean. Ce dernier traitait également de la révolte des Bédouins contre l’Empire ottoman fomentée par le protectorat britannique. Longtemps influencé par les films de Sergio Leone, de John Ford ou ceux d’Akira Kurosawa, le cinéaste jordanien met à jour, avec ce premier long métrage, cette période où les révoltes contre l’empire ottoman deviennent un cadre parfait pour faire un western dans le Wadi Rum.
Tout au long du film, nous suivons l’intrigue et son déroulement avec Theeb. Ce garçon curieux de tout n’hésitera pas par la suite à quitter la communauté pour partir sur les traces de son frère et de l’anglais en empruntant des chemins semés d’embûches. C’est ainsi que nous pouvons voir le film : comme une initiation, un passage vers l’âge adulte.
La trame se déroule uniquement à travers le jeune Theeb et c’est d’ailleurs pour cela que le genre du western marche très bien. Transformer les conflits de la première guerre mondiale – que nous voyons enfin mise en scène en dehors du contexte cinématographique européen – pour lui faire prendre des allures de Eastern à la conquête de l’Orient lointain est une démarche intéressante.
En même temps, nous ne voulions pas imposer simplement le genre de film western aux Bédouins, nous avions dans l’idée, au contraire, de pénétrer dans leur culture et de laisser en sortir quelque chose d’organique. Nous voulions développer une histoire qui devrait être à la fois cinématographique et vraie par rapport à leur mode de vie*.
La mise en scène et la prise de vue ont valu au film plusieurs prix en 2014 dont l’Orrizonti de la meilleur réalisation au festival de Venise ; le prix de la meilleure cinématographie et direction artistique au festival international du film du Caire ; et le prix de la meilleur réalisation par Camerimage. En effet, la façon dont Naji Abu Nowar a filmé le désert, de jour comme de nuit, est assez exceptionnelle. Malheureusement, le récit et son déroulement nous laisse dans l’attente voire donne une certaine frustration. Si l’intrigue de Theeb est simple, l’action dramatique est soignée et confère à ce film tous les ingrédients d’un film d’aventure.
Naji Abu Nowar est un cinéaste né au Royaume-Uni, qui vit et travaille à Amman aujourd’hui. Sa carrière dans le cinéma débute avec sa sélection au RAWI Film Lab 2005, organisé en collaboration avec le Sundance Institute. Il y a développé son premier scénario, Shakoush (Marteau). Il a ensuite écrit et dirigé le court-métrage Death of a Boxer (2009) qui fut présenté dans de nombreux festivals tels que Palm Spring, Dubai, etc. Theeb est son premier long métrage de fiction et sortira dans les salles françaises le 23 novembre 2016.
* Les citations proviennent du dossier de presse de Theeb