Ya habibi… Let’s talk about sex

Crédit photo : DR

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Envolons-nous en Égypte pour une leçon un peu particulière made in le pays des Pharaons.

20 ans et… des hormones

Haram, Hchouma ou A3ib, voilà les mots associés à la sexualité du Maghreb au Machrek. C’est justement pour s’attaquer à ce tabou et aux dégâts qu’il cause que le jeune Youssef Alimam a eu l’idée de faire un court métrage sur la question, et plus spécifiquement celle de la frustration sexuelle. Sourire charmeur, gouaille irrésistible et humour à la Yann Barthès, le jeune réalisateur nous embarque dans un cours de sexualité et entreprend d’expliquer que le désir sexuel n’est pas répréhensible en soi car il émane d’une pulsion de vie, la libido. En effet, certains seront étonnés mais les Arabes n’échappent pas à l’analyse freudienne de l’éros.

En compagnie de son ami Mazen, le voilà qui dissèque avec humour les moyens utilisés au quotidien par les jeunes Égyptiens pour contourner les interdits. Pourtant, sous des dehors humoristiques, il tente d’interpeller sur un véritable problème de société en le prouvant chiffres à l’appui : l’Egypte arrive dans le groupe des dix premiers pays pour la recherche du mot sexe sur Google, le taux d’harcèlement sexuel y atteint les 83%…

Bref mais incisif, Youssef Alimam nous rappelle en 14 minutes que le sexe n’est pas quelque chose de sale ou de honteux et qu’il est avant tout un facteur biologique. Mais les racines du problème sont profondes : dès le plus jeune âge, l’on inculque aux enfants qu’ils doivent inhiber leurs pulsions et se sentir fautifs, créant ainsi de la frustration et surtout une méconnaissance du fonctionnement biologique de leur propre corps.

 

Face à la position de l’autruche adoptée par les parents et l’école, les adolescents et leurs hormones n’ont d’autre choix que de se rabattre sur le net et la pornographie pour essayer de comprendre….

Une obsession néfaste

Paradoxe qui n’en est pas un, puisque l’interdit provoque toujours l’effet inverse, l’omniprésence de la tension sexuelle entre hommes et femmes se ressent partout et la mixité devient dès lors suspecte et répréhensible. En Égypte, le comble de cette obsession pathologique avait été atteint lorsqu’une fatwa d’Al Azhar préconisait d’allaiter son collègue à 5 reprises afin d’autoriser la mixité dans un même bureau (la logique – oui, il y en a une – était qu’en lui donnant le sein la femme ferait de son collègue son fils de lait et rendrait « licite » le fait de travailler dans la même pièce…). Sans compter que la méconnaissance de la sexualité entraîne des conséquences sur la société entière et crée des générations d’hommes et de femmes « handicapés » sentimentalement, incapables d’apprécier le plaisir sexuel sans culpabilité.

Haram, Hchouma ou A3ib, voilà les mots associés à la sexualité du Maghreb au Machrek.

Alors que l’Orient arabe a longtemps été associé à la sensualité et à une jouissance charnelle débridée face à un Occident engoncé dans son puritanisme moralisateur, force est de constater qu’aujourd’hui cette image est aux antipodes de la réalité. Le poids de la religion et les problèmes structurels tels que le recul de l’âge du mariage font de la frustration sexuelle le lot de beaucoup de jeunes (et moins jeunes). Mais ici encore, il est surtout question de la volonté patriarcale de contrôler la sexualité féminine jusqu’au mariage, seule institution pouvant régir les rapports entre hommes et femmes. En Egypte cela se traduit aussi par la pratique de l’excision qui vise à cadenasser le désir des femmes et donc à les empêcher de « fauter » avant le mariage ou en dehors de celui-ci.

Malgré la gravité du sujet, l’humour légendaire des Égyptiens, une fois encore, ne se dément pas. La vidéo est d’ailleurs rapidement devenue virale, un succès amplement mérité et qui, on l’espère, sera le début d’une carrière prometteuse pour un artiste aux multiples talents et à l’ambition affichée.

3 commentaires

  • Anonyme dit :

    L’article était vachement mieux foutu que la vidéo génératrice :)
    C’est vrai que le silence des parents sur le sujet va trop loin. Le pire, c’est que quand ils prononcent leurs éternels hchouma 3ib 3ar hram, c’est toujours sous un ton plutôt coléreux. Al khout, comment voulez vous que je le sache alors vous ne m’en avez jamais parlé ?
    Après tout, ce n’est pas la jeunesse qui est à blâmer dans cette histoire, oh non.

  • Anonyme dit :

    À ceux qui disent que l’article incite à la débauche : On n’en parle pas, on n’en parle pas… Et on se demande pourquoi est-ce que la société va mal. Mais b***** comment voulez vous qu’on distingue le bien du mal si on refuse catégoriquement de donner une image concrète de ce qu’on pense comme mal ? Parfois, il faut renoncer à cette pudeur bucolique et bavarder en tête à tête avec son ado « Mon fils, tu as l’âge. Voici ce qui t’attend… Mais sache que c’est irréligieux(SI JAMAIS croyances religieuses il y a) et contre les mœurs, qu’on te montrera du doigt… Ce n’est pas négatif. Tu peux parfaitement exploiter ta libido dans un autre domaine (de préférence, créatif) » Qu’est-ce qu’il y a de mal à ça ? Est-ce que ce genre de conversations ne limiterait-il pas le harcèlement ?
    À bon entendeur.

  • Un lecteur dit :

    Merci de nous avoir fait partager ce film, et un grand bravo pour l’Article ! le court métrage m’a fait rire au larmes haha !

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